jeudi 8 décembre 2011

Rêver la liberté à Barcelone


Jeudi 15 juin 2006
RÊVER LA LIBERTÉ À BARCELONE
 
À mon arrivée le matin, j'ai l'habitude d'étendre de tout son long Le Devoir sur la large filière couleur crème qui est à cinq pieds de mon bureau, au milieu de la place où circulent les employés.  Il arrive que des collègues s'arrêtent pour le feuilleter.  Et me parler.  Aujourd'hui, Geneviève, ingénieure, me demande s'il y a quelque chose à propos de la Catalogne.
 
- Ah!, que je réponds, tu sais bien que là-bas, chacun tire sur sa couverte.
 
Elle l'a bien rit.  (Je ne sais si chez vous, catalogne a le sens de couverture piquée à la main sur un métier.  J'ai vu ma mère le faire une fois.  Ça lui prenait tout l'espace du salon et un temps qui m'a semblé une éternité.)
 
Je ne connais rien des Catalans.  Il y a bien eu cette charmante fille aux cheveux foncés qui parlait très vite et qui bossait comme une malade à servir et gérer un Van Houtte (comptoir à café) au Complexe Guy-Favreau - que nous avons traversé ensemble, cher J.-P.  Je lui avais demandé de m'aider à prononcer et orthographier le mot TIRANÍA pour un texte sur la dictature au Chili.  Pendant longtemps, elle a par la suite vérifié si j'accentuais au bon endroit la TIRAN Í A!  C'était notre bonjour de connivence. 
 
Il s'agissait d'un mot espagnol et non pas catalan, bien sûr.  Les Catalans sont bilingues. Six millions, comme nous.  Bilingues.  Leur histoire distinctive récente passe par le cauchemard du franquisme, période noire où fut interdit la langue.
 
La langue est aujourd'hui plus vivante que jamais.  Ce qui démontre une fois de plus que la langue est beaucoup plus qu'on moyen de communication : c'est une identité, une forme de vie que l'on défend comme on défend sa peau.
 
Les Catalans connaissent beaucoup plus le Québec que nous les connaissons.  À mon étonnement, j'apprends qu'ils nous considèrent comme un modèle de développement.  Ils ont calqué notre politique de la langue (affichage, intégration des immigrants) et l'organisation de la police.
 
Si je comprends bien l'enjeu de leur présente campagne référendaire, les Catalans, qui pensent aussi Europe, seront reconnus comme nation si le oui l'emporte.
 
Alors, politiquement parlant, ce seront eux qui seront en avance sur nous, quoi qu'en disent les indépendantistes catalans et possiblement québécois.
 
Il est quand même intéressant de suivre la trajectoire des petites nations.  René Lévesque y a puisé plusieurs de ses enthousiasmes.  Mais c'est le poussiéreux parti communiste du Québec qui m'a permis de réfléchir à la signification de l'égalité des peuples et des nations.
 
  Bonne fin de journée.
 

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