dimanche 20 novembre 2011

Denise Boucher : une fée sous la pluie



Dimanche 30 avril 2006
UNE FÉE SOUS LA PLUIE
Ce n’était pas supposé, mais j’ai rencontré une fée l’autre soir, à l’Utopik. Après une petite fête de fin de session à l’université, je voulais siroter en solo une bière pour réviser le travail de session que venait de me remettre mon prof.   Un «A», mais avec des annotations et des remarques de bord en bord...
Lorsque je gagnai le café à l’étage, la fée était en train de lire un texte sur la petite scène improvisée qui donne sur Ste-Catherine.  Elle terminait sa lecture en fait.  Elle vint reprendre sa place juste à côté de ma table.  Pendant que l’on présentait Yolande Villemaire - douceur bleue, nuage de soie incarné -, je dis à Denise : «Je vous suivais aux Décrocheurs d’étoiles».  Vlan!  Elle me décroche un bec sur la joue.  Elle m’en donnera au moins trois dans le temps de la dire.
C’est une vraie fée qui s’appelle Denise Boucher.  Née à Victoriaville, la jeune maîtresse d’école timide rencontre la gent littéraire - Miron et compagnie - chez la sorcière bien connue des Cantons-de-l’Est, Françoise Gaudet-Smith.  Puis elle suivra sa vocation d’artiste, s’établira à Montréal, fréquentera Gauvreau, Langevin, écrira des chansons, fera jouer Les fées ont soif en 1978 contre vents et marées de la droite.
À l’intermission*, nous devions tous les deux partir.  Nous sommes sortis ensemble.  Il pleuvait.  Je suis remonté prendre son parapluie oublié à côté du piano. Dehors, nous avons parlé quelques minutes sous la pluie froide d'avril.  Elle m’a passé un coin de parapluie.  Ce signe ne trompe pas, comme disait Félix Leclerc.
Je lui a parlé de sa série aux Décrocheurs d’étoiles où l’on pouvait entendre la voix macédoine des poètes d’un peu partout dans le monde.  Une traduction off, avant ou après les lectures était assurée par Denise. «J’ai adoré faire cela», me dit-elle.  Un jour, dans un resto de Montréal, à sa grande surprise, on l’a applaudit.  Les gens avaient reconnu la fée qui fait passer en ondes des poètes en langue arabe...
Tu vois Denise, les fées ne passent pas inapperçues!
Tout ce que tu veux
Je l’ai dans mes champs
Tout ce que tu veux
Je l’ai dans mes mains
(Denise Boucher, Jezabel, Chant de l’abondance.)
* Soirée de poésie qui s’appelle SoloVox et qui a lieu tous les derniers mercredis du mois à l’Utopik, 552 Ste-Catherine Ouest, sous les bons soins d’Éric Roger.

Manif SOS Orford


Samedi 22 avril 2006
PHOTO-MANIF SOS ORFORD À MONTRÉAL
 
 
 
«Save the Park Orford», disaient les petites manifestantes.
 
Donnez-moi, donnez-moi de l'oxygène!
 
Monsieur Patapouf 1er...
 
Des manifestants de tous les âges.
 
«Le p'tit Québec de mon coeur» (Raymond Lévesque).
 
Plusieurs milliers de manifestants passent devant le Reine Élisabeth sans chanter bonne fête à Sa Majestée!
 
L'écrivain Marie Laberge qui ne joue pas sur les mots s'est adressée à foule : «Cette histoire est mal partie. Mais elle pourrait se terminer très bien grâce à vous».
 
Au micro Gisèle Lacasse-Benoît, et à sa gauche Suzanne Comtois, les porte-parole de la coalition SOS Parc Orford. À droite, Vincent Vallières se prépare à chanter une chanson de Desjardins.
 
Richard Séguin à la guitare. Il se demandera si le gouvernement a encore à l'esprit la notion de sens commun. À gauche, André Boisclair, qu'on distingue mal, tape des mains. Solution politique a-t-il dit. Mais au lieu d'un «peut-être bien», pourquoi ne pas s'être engagé à renverser la loi annoncée sur la privatisation d'une partie du parc Orford s'il est élu Premier ministre?
Fin de la manif au pied du Mont-Royal. Dans les années 70, les Montréalais ont résisté à la folie des funiculaires et autres attrapes-touristes.
(Photos jd., 22/04/06)
PAR JACKY BOY | LE 2006-04-22 19:12:24 | PERMALIEN 
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1 Commentaire :

Commentaire écrit le mercredi 21 mars 2007 à 14:18:41 (lien)
mick joe
jee

Épervières


Mardi 18 avril 2006
ÉPERVIÈRES
 
Cré taxes! Il fait chaud à pouvoir semer les patates et les oignons!
 
Qu'est-ce qu'on est venu faire en ville avec les camions?
 
D'ici trois semaines, gageons qu'on va zieuter les épervières qui s'épivarderont dans les parterres sauvages et les vieilles prairies...
 
«Qu'est-ce qu'on est venu faire ici?»
- Georges d'Or
 
C'est ce que je me disais ce midi en mangeant mon lunch dehors, au soleil, dans la cour de côté d'une église du centre-ville dont le nom m'échappe.  L'église des Saintes- Épervières, mettons.  
 
 
  
Photo jd, Les épervières, Béthanie, 12/06/05

À perte de vue


Dimanche 16 avril 2006
À PERTE DE VUE
 
«Il n'y aura jamais assez d'heures pour venir à bout de la mémoire»
 
Gil Pressnitzer, à propos d'Edmond Jabès 
 
 
«Lorsque la mémoire nous sera rendue, l'amour connaîtra-t-il enfin son âge?
 
Bonheur d'un vieux secret partagé.
A l'univers s'accroche encore l'espérance du premier vocable; à la main,
la page froissée.
Il n'y a de temps que pour l'éveil.»
Edmond Jabès, Toujours cette image
«Le livre est, peut-être, la perte de tout lieu; le non-lieu du lieu perdu.» (Jabès)

Gil Pressitzer est une espèce de garde à perte de vue dans la ville la plus rose, Toulouse.  Ami de Bertin, ami de Nougaro, cet ingénieur a la pigûre des mots.  En septembre 2005, il m'écrivait ceci à propos de son site (cf. Nomades dans mes favoris) :
«les articles non écrits par moi sont signés (poèmes,..) mais je dois avouer que je suis hélas le grand contributeur ce qui fait autant la faiblesse que la  cohérence de ce  site.

Jacques Bertin enregistre en ce moment un tout  nouveau cd mais il ne tourne  pas beaucoup en France où l'amour de la  poésie est bien médiocre

à bientôt en tout cas et je suis  preneur de textes sur la littérature  canadienne (Miron, Maillet,  Tremblay..) que j'apprécie  énormement.»
Puis à nouveau le 28 octobre 2005 :
«La belle littérature de “nos arpents de neige” restent  si peu connue et connue pour quelques noms (Tremblay, Réjean  Ducharme, Miron et encore!), que de trous béants...
Pourquoi pas nous aider à  les combler en acceptant d’écrire sur «esprits nomades»?
Le  seul texte en préparation est sur Gaston Miron mais il est encore  fragmentaire.  Donc on vous attend  Jacques!

Amitiés
gil»
Un jour. Un jour. 
Que je lui ai dit.

samedi 19 novembre 2011

Le Sommet des Amériques : l'autre versant


Samedi 5 novembre 2005
LE SOMMET DES AMÉRIQUES : L'AUTRE VERSANT
 
Bonjour.  15 secondes à la télé sur le sommet des amériques : 5 pour Bush, 5 pour Chavez et 5 pour 200 casseurs.  40 000 manifestants pacifiques n'existent pas.  Comme toujours. Je ne supporte plus cette manipulation des médias qui emporte tout sur son passage, y compris le débat au sein des forces démocratiques. Voici une page du journal de l'envoyé spécial de Point Gauche ! (1) à Mar del Plata.  Il y aura la suite pour les conclusions de ce sommet essentiel pour saisir le rapport des forces sur laplanète. amicalement
 
 j-p damaggio
 
****************
 
Mar del Plata, Argentine
Compte rendu de : Gianni Demai
 
3 novembre 2005, en direct du sommet des Amériques. Je suis parmi les marplatenses. J'avance tranquillement Avenue Independencia en direction de la mer. Avenue du 11 septembre, je vais prendre à droite pour atteindre le monument à la gloire de ceux qui sont morts pour l'Italie. La ville traverse un moment étrange : tout est fermé, les flics sont partout et on sent comme une agitation qui anime le regard des gens.

Je suis déjà devant les trois colonnes du monument qui symbolisent la terre, le ciel et la mer. Tout en haut, la louve romaine. Voici trente ans exactement j'apprenais avec douleur l'assassinat d'un Italien et c'est ce qui a guidé mes pas vers cet endroit de Mar del Plata. Ici, en Argentrine, on n'oublie pas Pasolini et si j'avais été à Buenos Aires j'aurais pu aller voir une rétrospective de ses films. Mais bon, je suis à 500 kilomètres plus au Sud, à Mar del Plata et je sens l'Italie un peu partout. La Palais municipal construit en 1938 par Luis Falcone (encore un nom qui fait penser à un mort pour l'Italie) reproduit une architecture de Florence.  Je ne suis pas ici en touriste ni en nostalgique de ma vie passée même si l'effort exceptionnel qui m'a incité à ce lointain voyage tient à quelques souvenirs. J'étais présent au Panama, en 1956,pour le premier sommet des prési- dents des Amériques : j'ai voulu retrouver cette ambiance dotée depuis, d'une autre sommet qui se tient en parallèle, le sommet des peuples des Amériques. C'est le troisième. Le présent, c'était dans les rues splendides de Québec !


Les 34 Chefs d'État au Sommet de Québec en avril 2001,
Archives Nationales du Québec 
 
 
Mar del Plata est coupée en deux comme le monde est coupé en deux.  D'un côté la cité touristique, vue sur la mer, grands hôtels, luxe exagéré, un tout petit coin du monde où 7000 policiers protègent une trentaine de chefs d'Etat. Bush avait envisagé de séjourner dans un porte-avion mais finalement il put réquisitionner l'Hôtel Sheraton (pour l'écrire à la castillane).

De l'autre côté, la cité où je marche, où des milliers de manifestants vont marcher demain pacifiquement, la cité populaire, celle qui souffre et va souffrir plus encore de la politique prévue par le sommet des chefs d'Etat, elle a pour symbole un musicien : Adolfo Pérez Esquivel, Prix Nobel de la Paix (j'ai noté avec grand plaisir la présence à ses côtés de l'Equatorienne Blanca Chancoso).

Un événement extraordinaire va se produire, un homme va participer aux deux sommets. Non, il ne s'agit pas de Lula, président du Brésil, qui, en son temps, participa au FSM de Porto-Alegre avant d'aller se vendre à Davos. Il s'agit, vous l'avez deviné, d'Hugo Chavez qui interviendra dans le stade où les opposants au sommet vont se réunir. Va-t-il réussir, dans le communiqué final des chefs d'Etat à faire enlever le mot « ALCA » (2) de la déclaration finale ? Lui, il défend le mot « ALBA » (3) et au stade, pour une aube toujours pleine d'espérances, il parlera après les chants de Silvio Rodriguez (il sera accompagné exceptionnellement par le groupe chilien Inti-Illimani). Emir Kusturica sera là et je ne sais si c'est pour la musique ou le cinéma : dans tous les cas c'est pour la poésie. Chavez et Bush le face à face permanent : Bush a réussi à faire signer un accord de libre-échange dans les Caraïbes (Cafta-DR). Chavez a réussi à faire signer aux mêmes un accord pour l'achat à bas prix de son pétrole ! Mais parleront-ils de la situation dramati-que en Haïti ?

Ici, le maire s'appelle Daniel Katz et le journal s'appelle La Capital. Hier j'y ai lu avec délice le compte-rendu du dernier livre de Salman Rushdie qui vient de paraître en France, Shalimar le clown. Rien à voir avec son précédent roman qui dénotait une certaine fatigue. Il retrouve son univers, là où le Cachemire est en ébullition (...)

Voici à présent quelques revendications du peuple en lutte : pas de paiement de la dette, (oui mais même le Venezuela de Chavez la paie); pas de militarisation du continent (mais le Paraguay comme la Bolivie vient de décréter, avant toute bavure, l'immunité pour les militaires nord-américains qui vont s'installer massivement au Paraguay); plus de droit à la santé et à l'éducation (or la misère progresse partout). Que peut-il se passer ?

J'écris aujourd'hui car demain vendredi et encore moins samedi, je n'aurai pas le temps. Demain, je serai au Théâtre Auditorium entre 16h30 et 17h15 pour l'inauguration officielle du sommet des chefs d'Etat (j'ai une entrée spéciale) avant d'aller au Stade retrouver le peuple. Les Huiles se réuniront à l'Hermitage Hôtel avec ensuite le repas au Casino Central. Les débats des géants porteront sur une grande politique de l'emploi (c'est un truc à la mode) capable de faire reculer la pauvreté et de consolider la démocratie. Une déclara-tion finale doit émerger mais à cette heure-ci les négociateurs n'ont pas encore trouvé un point d'accord total.

J'écris à 16 heures, après ma balade matinale vers le monument, tout en écoutant la fin d'un débat passionnant dans un atelier qui se tient dans une salle du Stade. L'organisateur est une revue du Venezuela America XXI et la discussion porte sur la réalité de l'ALBA qui se veut une alternative à Bush. Il y a dans la ville des milliers de débats qui se tiennent au Polideportive (toujours avenue Indépendance) et au Stade. Un des grands sujets est celui du rapport entre le nationalisme si fréquent aux Amériques et l'intégration bolivarienne. La pensée de Toni Negri (il est passé hier par l'Argentine en venant du Chili en route pour le Brésil) a été appelée au  secours ! Encore un Italien, mais celui-là me met en colère. Il a découvert la fin de l'impérialisme des USA auquel se substitue un Empire sans
frontière. Des Bolivariens le défendent car il prône l'intégration de l'Amérique latine pour accroître ce qu'il appelle un monde multi-polaire.  D'autres rappellent qu'il a dit Oui à la Constitution euro-péenne (avec la même idée, la constitution d'un autre pôle) et que sa pensée s'accorde tout à fait avec des éléments du néo-libéralisme. Franchement, le débat d'idée va à toute vitesse. Je sens que je fatigue et qu'à 17 heures, je vais rentrer me reposer plutôt que suivre les débats dans une salle à côté sur la marchandisation de l'éducation aux Amériques. Ce sont des chiliens qui doivent l'animer.  En fait, il faut que je me prépare surtout à la grande journée de demain qui fera date. Franchement, je ne sais pas si je pourrais vous en rendre compte.

 Notes jd:
 
1) Point Gauche ! est une publication (sauf erreur trimestrielle) du Sud de la France (Tarn-et-Garonne, Montauban et les environs) qui a plus de dix ans d'existence, qui vise à «informer librement pour agir autrement», est «à la recherche d'une idée neuve du bonheur».   http://perso.wanadoo.fr/jean-francois.mavel/pointgauche.htm
2) L'ALCA :  Zone de libre-échange des Amériques  (ZLÉA en espagnol)
3) L’ALBA : renvoie à une alternative réelle pour l’Amérique latine

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1 Commentaire :

Commentaire écrit le lundi 7 novembre 2005 à 06:48:07 (lien)
René Merle
Beau texte, Jean Pa ul. Et heureusement que Lula a consolé Bush...
René
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La Chango Family


Vendredi 4 novembre 2005
PLUS «HOT» QUE MICHAËLLE, LA CHANGO AU CLUB...
 
Demain, au Club Soda, dans le cadre de Coup de coeur francophone, j'irai applaudir nulle autre que la Chango Family, ensemble plus «hot», à mon avis, que les prétentions de madame la gouverneure générale!  Surtout que les Chango ont invité une vraie bombe à se joindre à eux : Yann Perreau!

 
 

La nuit, le chant


Jeudi 3 novembre 2005
LA NUIT, LE CHANT

«Le regard qui jettera sur mes
épaules Le filet
indéchiffrable de la nuit Sera
comme une pluie d'éclipse
Il descendra lentement de son
cadre solaire Mes bras
autour de son cou»
(René Char - André Breton, Paul Éluard / Extrait de Ralentir Travaux , 1930)

«Au sein de la terre, j'écarterai
les émeraudes pour t'apercevoir
et toi d'une plume d'eau messagère
tu seras en train de copier l'épi »
«Je ne suis rien venu résoudre.
Je suis venu ici chanter
je suis venu
afin que tu chantes avec moi.» 

(Pablo Nerruda, Le poète, extrait de El Canto General, 1950)

                                                     Neruda / Allende 

Passer la quête


Lundi 31 octobre 2005
PASSER LA QUÊTE
 
«Nous ne cesserons pas notre exploration
Et le terme de notre quête
Sera d'arriver là d'où nous étions partis
Et de savoir le lieu pour la première fois.»
 
-  T.S. Eliot
 
 
 
Photo jd, Anse-Pleureuse, P.Q., mai 2005.

jeudi 17 novembre 2011

Page de calendrier à Peasley

Vendredi 28 octobre 2005
PAGE DE CALENDRIER
 
 
Photo jd., Lac Peasley, 10/10/05
 

Tirer la langue

Jeudi 27 octobre 2005
TIRER LA LANGUE
Bonjour,
J'ai beaucoup apprécié l'intervention de Jacques Rancourt ce matin dans Le Devoir (1).  Il fait la critique d'une pièce de théâtre tirée du corpus de Jacques Ferron, un auteur québécois admirable, profondément subversif, un écrivain comme je les aime, trop peu connu à mon goût dans l'ensemble de la francophonie.  Lire L'Amélanchier de Ferron est une leçon de vie.
Mais l'intérêt de la critique tient à la réflexion sur la langue, l'accent, la pensée, l'intelligence.  Ou la dissonance.  Le porte-à-faux.  Le perlage, le pettage de broue plus haut que le trou.
Je vous ai vu prendre des notes sur le vif des conversations lors de votre séjour québécois.  C'était un effort pour capter la différence à l'intérieur même de notre langue.  De même, lors de mes promenades dans les rues de Montauban, j'étais étonné de lire le nom des gens et des places emmêlé aux traits du paysage et à ceux des figures humaines. Paysages et visages.  À la volée : Bruniquel, Capelle, Pont de Sapiac, Quai Poult, rue Carroul, Antonin Perbosa. 
J'avais aperçu en Louisiane quelques facétieux parmi vos compatriotes marquer subtilement la différence, comme bien entendu, lorsque l'accent chantant du Sud se frottait à la ligne pointue du Nord.
Comme si l'accent accentuait ou dévalorisait les arguments que l'on énonce.  Comme si la raison en dépendait.
On comprendra vous et moi ce qu'est le poids d'un accent.  Que l'habit fait le moineau.  Surtout s'il sent la campagne, l'arriéré.  Mais en plus, il est vrai, notre peau blanche est ici colonisée.  Cela vient de si loin.  Je ne peux pas parler la langue que ma mère parlait.  C'est avec difficulté que je chercherais à l'évoquer par l'écriture.  En ce domaine, Michel Tremblay est un génie.  Je suis triste face à la réalité : ma mère savait à peine lire et écrire.  Alors que moi, je m'en délecte au point de construire ma vie de tous les jours sur ces châteaux en Espagne!   Mais je n'ai honte ni de ma mère ni de moi qui reste si ignorant.  Ma langue maternelle me permettait tout de même de parler à ma mère dans sa langue.  Et résonnera en moi jusqu'à ma mort la musique de cette langue-là.  Pas nécessairement belle.  Ni riche.  Mais c'était une langue humaine, essentielle.  
Le silence de ce pays est peut-être impérissable. Voilà, dans la brume, le peu que j'en dit aujourd'hui.
J'aime bien penser aussi avec Rancourt que les plus grandes œuvres de ce coin du monde sont devant nous.  Ce n'est pas là un espoir.  C'est plutôt l'effort bien humble de capter le passage de la nuit au jour.  Habituellement, on dit l'inverse.  Mais moi, je suis un oiseau de nuit et je crois que nous excavons la nuit.  Il faudrait en laisser un peu.  Pour faire la différence.
Jacques
1) Il s'agit de l'édition du 10/02/04, date à laquelle cette lettre-courriel fut rédigée.

__________________________________________________ 
Cher jacques
La langue toujours la langue et donc les chemins de la langue.
Il faudrait tracer les imperceptibles chemins de la langue faite et défaite qui passent par des écrivains comme Ferron, ou Cladel chez moi, ou Arguedas au Pérou. Ces chemins passeraient par le rapport au lire et écrire comme instrument de libération et d’aliénation. Avec le chanter pour faire le lien. La langue écrite pose une inévitable normalisation qui en retour veut normaliser la voix. Une revanche de l’écrit sur l’oral qui n’a pas eu lieu en Italie où c’est l’oral de la télévision qui est devenu la normalisation des voix.
D’où l’interrogation incessante et douloureuse sur la culture ! Ta mère était-elle sans culture ? Oui répondent les tenants du parti d’avant-garde : elle avait besoin d’un guide pour s’orienter vers le progrès. Ensuite les partis d’avant-garde s’étonnent d’être devenus des églises ! Nos mères étaient-elles sans culture ? Non et cent fois non quand on pense que la culture est une dignité dans la vie, dignité qui vaut plus que tous les progrès réunis. Comment les conservateurs finirent-ils par comprendre qu’ils pouvaient conserver leur pouvoir en détruisant le sens premier de l’héritage ? En élargissant leur sens de la conservation du politique au social. Qu’importe le politique, c’est surtout l’ordre social qu’il faut conserver !

Tu ne peux imaginer combien à croiser nos regards sur le monde, le mien peut devenir plus mobilisé. Le Québec reste le Québec en tant que laboratoire général du culturel comme survie sociale, face à l’économique comme enterrement du politique.  A suivre. 
Jean-Paul Damaggio, France, 13/02/04

Rosa monte dans l'autobus

Mercredi 26 octobre 2005
ROSA MONTE DANS L'AUTOBUS DU PARADIS
Envoyé par Sylvain.  Source de la caricature non mentionnée.

Une fleur pour Rosa Parks

Mardi 25 octobre 2005
UNE FLEUR POUR ROSA PARKS
 
Rosa Parks est cette jeune femme noire de l'Alabama qui, en 1955, refusa de céder son siège à un homme blanc dans un autobus public de la ville de Montgomery. Cette histoire à fait le tour du monde et, pour reprendre les mots de Martin Luther King, à ce moment-là lui-même jeune pasteur indigné à Montgomery, ce geste de résistance, courageux pour l'époque, précipita la contestation virulente du ségrégationnisme officiel en vigueur alors au pays de l'oncle Sam. Son exemple a inspiré des milliers de militants qui ont mené les grandes batailles de la décade 1950-1960 en faveur du respect des droits civils. La ségrégation fut abolie en 1964. Rosa Parks vient de rendre l'âme à Détroit à l'âge de 92 ans.

Not dark yet

Dimanche 23 octobre 2005
NOT DARK YET
 
Vu en DVD la première partie de No Direction Home, le brillant documentaire de Martin Scorsese consacré à Robert Bob Dylan.  À revoir le regard tranquille et intelligent de ce garçon exigeant, continuellement à l'oeuvre, cherchant sur toutes les routes le son familier, la strophe radicale, je me persuade encore davantage de cette conviction qui est peut-être une émotion et ce depuis les années 1975, à savoir que Mr. Tambourine est le plus grand troubadour vivant à ravager, soir après soir, les scènes du monde.
 
«Quel est donc ce langage qui fait que je t'entends
qui fait que je t'attends comme animal en cage
dans la prison des mots qui nous désappareille...»
-Gilles Vigneault, Chanson pour Bob Dylan (1971), cité de mémoire.
 
 
                      «How does it feel
                            How does it feel
                               To be on your own
                                   With no direction home
                                       Like a complete unknown
                                          Like a rolling stone?»
                                                  Like a rolling stone (1965)
 

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3 Commentaires :

Commentaire écrit le dimanche 6 novembre 2005 à 20:59:16 (lien)
Lien Roger Ebert
http://rogerebert.suntimes.com/apps/pbcs.dll/article?AID=/20050919/REVIEWS/509200301/1023


Commentaire écrit le dimanche 6 novembre 2005 à 20:57:44 (lien)
Liens - Roger Ebert
http://rogerebert.suntimes.com/apps/pbcs.dll/article?AID=/20050919/REVIEWS/509200301/1023


Commentaire écrit le jeudi 27 octobre 2005 à 22:07:26 (lien)
Pierre-Olivier
En lisant ça :"Mr. Tambourine est le plus grand troubadour vivant à ravager,
soir après soir, les scènes du monde", ça m'a fait pensé à un petit article
que j'ai lu dernièrement sur la capacité des vedettes d'un "autre temps", à remplir leur salle lors de spectacle: résultat: Dylan est 3e avec 90% des sièges comblés!

Mon équipe de ô quai

Mardi 18 octobre 2005
À L'AFFICHE : MON ÉQUIPE DE Ô QUAI
 
Je suis attaché à cette veille affiche de la moins célèbre des Nuits de la poésie, celle de 1991... Le hasard a d'abord voulu ce soir-là que je sois assis aux côtés de Pierre Perrault et de sa compagne. C'était déjà ouf! pour le groupie que je suis. Puis, en ouverture de la soirée, Marie-Claire Blais, lumineuse, a lu un texte pacifiste - nous sommes le 15 mars 1991 et c'était l'Irak prise 1, n'est-ce pas?! Plus tard, comme sur un trottoir à faire rougir Aristote, Josée Yvon, magnifique cowgirl chambranlante, est venue clouer ses poèmes de soie avec ses hautes bottes, mais elle fut éjectée de la scène parce qu'elle dépassait le temps alloué, cinéma oblige! Idem pour Janou St-Denis qui rua de sa voix rauque. Badibadagne! Juste avant l'intermission, le collectif Gaz Moutarde prit d'assaut la scène et réclama la liberté de la poésie dès cette nuit même! Perrault ne revint pas à la seconde partie. Qui a vu le film que l'on tournait comme ce fut le cas en 1970 et en 1981? Et pourquoi, M. Labrecque, n'y a-t-il pas eu de Nuit de la Poésie en 2000? Pourtant, cette nuit-là, Denis Vanier décocha des flèches tatouées pour l'éternité dans nos mémoires. Et la bonne humeur revint tout à fait après l'intervention très applaudie de Patrice Desbiens qui a su choisir des mots simples en l'honneur de son ami Gilbert Langevin. Alors, la poésie a pu reprendre son coeur d'oiseau. La frêle Geneviève Amyot vint à son tour, je ne sais quand, allumer intensivement un incendie en direct avec une si douloureuse complainte, une offrande, une soeur mourante qu'elle cherchait, je crois... Quel beau texte récité mieux qu'une tragédienne! Je n'ai jamais revu cette femme que j'ai aimée tout de go. Passé minuit, les jolis mots tissés en grappes de Denise Desaultels profitaient de l'écho pour me suivre déformés en musique, ils glougloutaient jusqu'à la toilette des hommes, loin dans l'irréel de ma tête, mademoiselle, pourtant un seul étage plus bas que la salle Marie-Gérin-Lajoie...
 
Il y a encore bien d'autres noms qui chauffaient dans la nuit et que l'on trouve sur l'affiche: Alonzo, Beausoleil, Brault, Boucher, Chamberland, Charron, Garneau, Lalonde, Giguère, Haeffeley, Jacob, Lapointe, Malenfant, Miron, Piché, Pilon, Roy, Michel Van Schendel...
 
Comme un bateau qui sort par l'horizon, quand il en part un, cela fait un trou au bas de l'affiche ou plutôt, le nom reste avec un grain de pierre sur les lettres.  Je me recueille alors et mes pensées les meilleures se tournent vers cette belle grappe de poètes, porteurs provisoires, humains, trop humains, de mots, de vie et d'aviron. 
 
Pour dire comme Michel Garneau, ce n'est pas tant les poètes en eux-mêmes qui m'intéressent que la poésie qu'ils font et qui nous mène en haut. Vers l'absence...
 
N'empêche, c'est une sapré bonne équipe de Ô quai, n'est-ce pas?  Il faut la voir à l'oeuvre.
 
Photo jd.

Michel Van Schendel : mémoire, combats...

Mardi 18 octobre 2005
MICHEL VAN SCHENDEL, MÉMOIRE, COMBATS , JARDIN ET SOLIDARITÉ
 
«Le songe la vague
La pierre
Qui hante la pierre au plus secret du vent
Rien n'est offert tout n'est pas dit
Le regard est proie pour l'ombre des gisants»
- Variations sur la pierre, L'Hexagone, 1964.

«Il n'est pas possible, j'en ai l'intime conviction, de conter les faits saillants ou anodins d'une vie, surtout la sienne, sans avoir recours aux procédés de la fiction. Celle-ci est le plus court chemin de la vérité. Car elle a l'audace de dire et d'inventer -- d'inventer pour découvrir ce que c'est que de dire et ainsi donner du poids à la parole»
- Un temps éventuel, L'Hexagone, 2002.

À propos de son Mille pas dans le jardin font aussi le tour du monde (L'Hexagone,2005), Michel Van Schendel disait : «Ça défend la mémoire, pas la devise.  Ça fait la distinction dans le poème, une distinction importante.  Ça oppose donc la consigne du souvenir à la mémoire.  La mémoire, c'est la vie même, le vif.  La mémoire, c'est toute notre vie.  Ce n'est pas seulement notre vie en-deçà de nous, c'est notre vie au-delà de nous, c'est notre parcours qui continue, même malgré la mort. Ce n'est pas du tout une proposition de croyant: je suis un incroyant radical.  C'est une proposition de vivant.  Le vivant ne peut pas faire autrement que d'avoir la mémoire, non seulement de ce que lui a fait, et de ce que lui est en train de faire, mais nécessairement, s'il est en train de le faire et de le poursuivre, c'est avec d'autres.  Voilà pourquoi la mémoire est une solidarité.»  Propos recueuillis par Stéphane Despatie, Poèmes de résistance, Voir, 29/05/05

Jazz : Rosenwinkel, Siroko

Jeudi 6 octobre 2005
JAZZ : ROSENWINKEL,SIROKO, DEUX BONS COUPS!
 
Photo Jacques Desmarais
 

Deux écrivains Français face à la justice

Mercredi 5 octobre 2005
DEUX ÉCRIVAINS FRANÇAIS FACE À LA JUSTICE
 
Cher Jacques Desmarais,
 
Je suis très touché par l'appui que vous nous apportez, depuis le Québec, dans cette pénible affaire. C'est un grand réconfort. Merci de faire ainsi circuler l'information parmi les écrivains, écrivaines et universitaires de votre pays dont nous serons fiers d'ajouter les noms dans notre comité de soutien. A ce propos, tous les renseignements sont accessibles sur le site de François Bon : www.tierslivre.net.
Bien chaleureusement à vous,
Jean-Michel Maulpoix

Do you know what it means to miss New Orleans?

Mardi 6 septembre 2005
DO YOU KNOW WHAT IT MEANS TO MISS NEW ORLEANS?
 
En 1974-1975, alors que j'étais «French teacher» dans une école primaire du Sud de la Louisiane, à Franklin, sur le bayou Teche, je me suis rendu autant de fois que j'ai pu à la Nouvelle-Orléans. Bien avant Montréal, c'est la première grande ville que j'ai connue. 
 
Mes humbles moyens de jeune voyageur me confinaient le plus souvent à la marche. J'ai néanmoins tenu à sortir de la toile bigarrée et tonitruante du French Quarter. Il m'est ainsi arrivé de monter dans des autobus bondés sans connaître à l'avance le parcours. Loin des touristes, je me suis promené, quel privilège, dans les faubourgs populaires de la ville en observant le peuple de la Nouvelle-Orléans. L'image des gens avec leurs paquets, leur marmaille, chacun avec un morceau de téléroman ambulant, allant, venant dans ces quartiers où persiste, on dirait, une odeur de sucre venue du Sud ou de la mémoire des aigrettes, là où les maisonnettes sont défraîchies par la chaleur cuisante et le manque flagrant de moyens. Tous ces flash incisifs me sont très chers et se catalysent à chaque fois que, d'aventure, un Louis Amrstrong, un Bob Moover reprend la très mélancolique Do you know what it means to miss New Orleans
 
Vous dire alors comment j'ai été bouleversé à la suite de Katrina, ce Monstre Ouragan qui a emporté âmes, toits et lieux! 
 
Quant à la Pieuvre qui se tentacule elle-même et qu'on appelle aussi l'Empire avec ses «Penseurs de fer» et ses «taches de graisse sur la conscience», elle restera égale aux flux du capital et laissera dire à son agenda qu'elle regrette! Et pourvu que les taxes n'augmentent pas!
 
Ah! mais je me le répète avec un zeste de trompette dans la nuit : Do you know what it means to miss New Orleans?

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2 Commentaires :

Commentaire écrit le dimanche 15 janvier 2006 à 14:35:28 (lien)
Pierre THIBAUD
Bonsoir -( Jack ?) J'étais french-teacher à Mamou de 72 à 74, un peu avant ton temps...Imbibé d'amitiés cajuns et musicales je n'ai jamais rompu complètement ce lienn de coeur avec ce pays. J'ai écrit, fait des expos, accueilli des groupes en France, couru avec eux des festivals, raconté...Heureux d'avoir très tardivement découvert ce blog (je n'en ai pas). J'habite en Périgord. Je vais tenter de t'envoyer un article que j'ai commis il y peu dans "Sud-Ouest" et commence aussi par "Do you know..."Amicalement Pierre Thibaud

Commentaire écrit le mercredi 15 mars 2006 à 21:27:18 (lien)
Jack

Bonsoir Pierre! Je repasse bien tardivement sur ce texte en archive et découvre avec joie votre mot laissé en janvier. Espérant recevoir ou bien trouver votre article. Amicalement.

Tonnerre de Blaise

 Vendredi 26 août 2005
TONNERRE DE BLAISE
«Toute vie n'est qu'un poème, un mouvement. Je ne suis qu'un mot, un verbe, une profondeur, dans le sens le plus sauvage, le plus mystique, le plus vivant. (…) Le chat domestique a le pelage soyeux; son échine est souple, électrique; ses pattes sont bien armées, ses griffes fortes; il saute sur la proie qu'il convoite. Mais le chat sauvage saute bien mieux : il ne manque jamais son coup. J'ai des chats sauvages plein la bouche».
- Blaise Cendrars

André Breton a-t-il dit passe...

Mercredi 24 août 2005
ANDRÉ BRETON A-T-IL DIT PASSE...

À 17 ans, j’ai découvert les surréalistes, plus tard les automatistes québécois, et je n’ai plus eu peur d’avaler des cailloux parmi les mots qui n’en étaient pas encore pour trouver ma propre voix.  

Le grabuge de la pensée vivante, de la poésie en jeu, en rut, en gouache sauvage, peut-être irresponsable mais qui allait néanmoins transformer des pans entiers de la philosophie du XXe comme le montre l'excellent Yves Bonnefoy dans Breton à l'avant de soi (Farrago, 2001), ce fut la plus invitante, la plus colorée des parties de cartes de mon adolescence, bien au-delà de la révolte de mes humbles barricades en état d’ébriété. 

Depuis les dégâts causés par ces trompettistes des années 1920, on comprend que les cadavres exquis sont passés derrière le comptoir à steak de la pub!  Mais comme la mauvaise herbe dans les prés verts, comme le jazz qui pousse entre les craques de l'alsphate des villes, pour dire comme Gilles Archambault, il y a la poésie nue de recettes, de poudre à canon, de vache à lait, de joliesse mondaine rebelle, de bourses Mont-Saigneur, de nature morte, de poils jaunisse.

À 17 ans, on n'est pas sérieux, comme le pensait le jeune Arthur.  Mais j’aime toujours passionnément être déjoué tout craché, tiré ailleurs, ébloui dans mes rêves les plus fourvoyant, réveillé par un éclat de rire à la Cendrars, barbouillé d'encre, piqué par l’intensité sur le bout de la langue, un couteau entre les mots plates, propres et rangés, là où il n’y a ni haut ni bas, disait Breton. 

L’imagination, c’est de la magie surdimensionnée sur le coin des lèvres, en pleine tempête de neige vivante...  Place à la tribu de la magie des mots!  

Je tombe cette semaine sur un Roi Mage, ami des peintres (Bonnard, Matisse, Braque) et des écrivains : il s'agit de Jacques Kober, né à Chartres en 1925.  Ce jeune poète de 80 ans fait donc partie de la seconde génération des surréalistes.  Dans la revue Remue-Méninges #20 (Belgique), on trouve de ce bourlingueur à chat mot un tout petit extrait digne de l’embonpoint volatil :

«J’ai respiré une fille qui étreignait
ce qui se fait en direction de toutes les jambes des fièvres des marais
connaissant le bas de son corps comme une bride de sabbat
la nuit faisait cri de partout dans une hémorragie de sable où le sperme lui-même vidait ses poumons»

Pour danser Aragon

Jeudi 18 août 2005
POUR DANSER ARAGON
 
 
Il y a Les Yeux d'Elsa de Louis Aragon.
Il y a les oreilles d'Aragon qui préférait le chant du portugais, la plus belle langue du monde, a-t-il dit un jour.
 
Il y a ce début vertigineux du poème :
 
«Tes yeux sont si profonds qu'en me penchant pour boire
J'ai vu tous les soleils y venir se mirer
S'y jeter à mourir tous les désespérés
Tes yeux sont si profonds que j'y perds la mémoire»
 
Il y a l'ami Claudio Lorenzo de Bahia, au Brésil, qui m'écrit avec son accent de papillon.  Il répond à ma demande de traduction des vers cités.
 
- Salut Jacques!
Je t'envoie une tentative, mais il y a beaucoup de choses d'Aragon traduites en portugais.  Je vais essayer de trouver des vraies traductions.  La plus grande dificulté pour conserver un peu du rythme original de ces vers, c'est qu'Aragon utilise très bien les pronoms «y» et «en», une ressource pour éviter la répétition du sujet.  Il n'existe pas de correspondance en portugais.

Voici donc Les Yeux qui dansent à la manière de Claudio:
 
«Teus olhos são tão profundos que ao enclinar-me sobre eles para beber
Eu vi todos os sóis vindo a eles se mirar,
E neles vi lançando-se a morte todos os desesperados.
Teus olhos são tão profundos que eu perco dentro deles minha memória»

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1 Commentaire :

Commentaire écrit le vendredi 19 août 2005 à 09:10:51 (lien)
Marc-Andé Delorme
Poufff...

J'avoue sincèrement que je ne pourrais point aller au delà de cette traduction. Félicitation à Claudio qui, je crois, à réussi à traduire l'âme du Poême.

La peau du ciel

Mercredi 17 août 2005
LA PEAU DU CIEL
Il y a encore des demoiselles qui traînent sur la rive, elles se meurent peut-être tout en cœur.  Mais il y a du très doux ce soir sur l'étang qui s'expatrie lentement vers l'invisible avec de la mousse amassée tout au long du jour dans la main des mendiants pour rapiécer, justement, les ailes de l'écho qui s'endort au loin sur la colline aux mille soupirs, espèces d'étincelles échappées ça et là dans les jardins surpris; il y a des frottis éphémères, des frottements de fruits, d'oiseaux et de pierres, des taches de rousseurs dans l'air...  Il y a mon amour qui veille, mon bel amour et son silence d'étoiles qui s'infiltre dans la peau du ciel.
 
 
Photo Jacques Desmarais.  La peau du ciel se mire sur l'étang Peasley
 
 
 

Jean Custeau

Jeudi 11 août 2005
JEAN CUSTEAU, TEL UN SOLO DE VIOLON

C'est Normand Baillargeon qui en 1998 m'a mis sur la piste du chansonnier Jean Custeau. Cet artiste des Cantons-de-l'Est affirme avoir toujours chanté à gauche et à droite - mais il préfère à gauche. L'album Le vin des anges (Phonovox 1997, 7945-2) que me signalait Baillargeon est un hommage fraternel à Gilbert Langevin et propose quatorze chansons du poète sur des musiques pour la plupart signées Jean Custeau.

J'aime beaucoup ce disque. 

Un jour, j'ai écrit à Jean pour lui dire que si j'avais ne fut-ce qu'un faux-filet de voix, ce serait ma joie de chanter Le vol imaginaire, chanson phare de l'album et que j'ai bien dû faire tourner mille fois. «Le délire a des ailes» au «pays des images», nous dit le poète. On y va, mais on doit bien aussi en revenir, «et le soleil hélas de la vie journalière, efface parfois les traces du vol imaginaire». Mais on ne sombre pas ici dans l'abyme du rêve! Langevin a ce côté oiseau-berceur qui ne craint ni le repos ni l'extase. 

Hier, Jean Custeau m'a fait suivre trois textes. Avec sa permission et pour rester avec Langevin, je propose la lecture de Amériquois, un titre qui, de loin en loin, rappelle les recherches de Pierre Harel, le tendre ravageur...
Merci, Jean.
__________________________
AMÉRIQUOIS*
(Jean Custeau)
De l’arbre duquel je descends
Voulu démêler les racines
Mais j’en ai déterré tellement
Que si j’y pense, j’hallucine
Je viens d’un grand terrain perdu
Entre le pôle Nord et le Vermont
D’un lieu rempli d’individus
D’un pays qui n’a pas de nom
J’suis à moitié Américain
J’suis à moitié Européen
Je suis à moitié Québécois
Je suis à moitié Iroquois
Mais non!
J’suis pas moitié Américain
J’suis pas moitié Européen
Ni Québécois, ni Iroquois
Mais je suis un Amériquois
J’ai pas grandi, mais j’ai poussé
Je n’ai pas appris la fierté
Même mes enfants sont égarés
Et ne savent plus où s’accrocher
Ils ne connaissent pas leur histoire
Et n’ont pas de chefs en qui croire
N’ont pas d’idoles ni de héros
Ne pensent qu’en uns et en zéros
À l’heure qu’il est je ne sais plus
Ce que demain me donnera
Si je descends encore plus bas
Je sais que je ne vivrai plus
Ce qui me reste au demeurant
Que j’peux léguer à mes enfants
C’est le refrain de cette chanson
Tel un solo de violon
*Amériquois : Québécois des Amériques (Gilbert Langevin). Langevin jugeait que le mot Québécois ne représentait pas tous les habitants du Québec. Il créa donc, en 1970, ce terme dans lequel on retrouve, en plus de la notion de Québécois de souche, celle de l’Amérique ainsi que celle de Premières Nations.
© copyright 2003, Jean Custeau, tous droits réservés, exécution publique SOCAN
jeancusteau@hotmail.com

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1 Commentaire :

Commentaire écrit le vendredi 12 août 2005 à 04:23:05 (lien)
jean-paul damaggio
salut jack
pourrait-on imaginer le chemin qui sépare le chansonnier version française, terme qui s'est perdu faisant référence à un genre bien précis des cabarets parisiens, au chansonnier version québécoise ? Et alors serions-nous sur ce chemin d'océan qui va de Montréal à Paris ?
amitiés jean-paul

Chemin faisant

Mardi 9 août 2005
CHEMIN FAISANT...
Mesurer la rudesse de ces compagnons traversant la poussière des chemins fut la première leçon retenue par la bagatelle de mes yeux. Doloré maniant la charrue, jurant, suant, mettant le feu aux pierres des champs alors que Jacques Brault, ce professeur du silence, s'attellerait à la rigueur des mots et aux rires des framboises. Tous deux m'ont donné idée du dilemme de la vie et du joyeux fardeau de la page. Des journées salivaires qui n'en finissent pas. La vie à la campagne où il arrive que les puits se taisent. La vie dans les livres qui passait jadis à la radio et qui ne saurait être seulement l'affaire des anges! Enfin, moi, je n'ai pas de gros bras dans le trafic du soir. Pas de diplômes mirobolant. Mais je suis rude, en effet, je suis rural en dedans! J'ai toujours la crainte de manquer de bois dans la voix. Le décor de séchoirs et d'épandeurs s'égosille entre les planches de ma vieille galerie universelle. Nous perdons mémoire des traces de braises dans le vent. Alors, je gosse le vocabulaire à la manière d'un paysan à plumes. C'est là une bien humble prière.

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1 Commentaire :

Commentaire écrit le vendredi 19 août 2005 à 09:21:10 (lien)
Marc-Andé Delorme
Jack.

Je suis heureux de voir que tu as suivis les conseils d'un jeune tekkie! Je crois fortement que ce moyen, attirant visuellement, saura bien enrobé, sans les trahir, tes paroles.

Sur ce, longue vie au blog a Jack!

Santé!

Un

Projet : rescaper Libre salmigondis...